La mécanique du cœur


Dans la collection

G&g
2003,

Dans la collection

Ed. Petit Véhicule
2009

 

Un quiproquo

Mathias Malzieu a repris ce titre pour sortir un roman en 2007 chez Flammarion. A quoi cela sert-il de disposer d’un ISBN ? On peut penser que Malzieu n’a pas eu connaissance du titre de RW. Ce ne saurait être la cas d’Amélie Nothomb qui a, sans vergogne, repris à son compte « Le voyage d’hiver » de Pérec. Dommage qu’elle n’ait pas aussi repris son talent !...

L’histoire

Antoine se fait opérer du cœur. Grosse opération, avec implantation d’une valve mécanique. Parallèlement ses affaires de cœur ne vont pas bien. Entre Claire, sa femme, et Katerina, il balance… L’hospitalisation, et le frôlement de la mort, lui permettront de se réparer. Sans doute.

 

 

     

 

Le début du livre

« Louis Malle, vous connaissez ? » Il a le stéthoscope sur les oreilles, l'air préoccupé soudain. « Malle, vous voulez dire le cinéaste ? » « Oui, le cinéaste, respirez fort par la bouche. » « Ni oui ni non, comme ça... Au revoir les enfants, ils viennent de le repasser sur Canal mais sinon... Il vivait aux Etats-Unis, je crois, non ? C'est pas lui qui était marié avec Fanny Ardant ? »
Ça fait cinq bonnes minutes que le toubib tourne autour de lui. Pour une visite de routine... D'habitude il a juste droit aux « crépitements » - « A quoi vous vous êtes mis ? Ce n'est plus le pavot de votre jardin ? Faites gaffe aux saloperies qui encombrent le marché ! » - et aux « sifflements » - « Le tabac, nom de Dieu, diminuez les doses ! Ou alors passez au havane comme ça vous vous ruinerez autre chose que la santé ! »
Il répond « Ces temps-ci je tâte du hollandais coupe fine, c'est peut-être ça qui vous perturbe : ça souffle plus maritime que d'habitude... » De la main l'autre lui fait signe de se taire. II bouge encore le stéthoscope autour du mamelon gauche. Hoche deux ou trois fois la tête en faisant la moue, « C'est bon, merci ».
Pendant qu'Antoine remet sa chemise, le toubib est à son ordinateur. Soucieux visiblement. Soudain il lui lance « Vous confondez avec Truffaut mon vieux, c'est avec Truffaut qu'elle vivait ! » « Truffaut ? Ah oui, Antoine Doinel, toute la série, Baisers volés, Les quatre cents coups... Moi, il m'a toujours tapé sur les nerfs avec sa façon de jouer, Léaud, pas vous ? » Il relit la feuille à la sortie de l'imprimante, griffonne encore quelque chose au stylo. Rédige l'adresse sur l'enveloppe en énonçant d'une voix neutre « Monsieur le docteur Ropars, rue... (il cherche) Vous trouverez dans l'annuaire, près du musée ».
Et d'un seul coup, d'un ton sentencieux, « Eh bien, mon petit vieux, je ne sais pas si c'est l'approche de la quarantaine mais vous nous faites un coup de calcaire. Au début je n'y ai pas cru mais là je suis formel. Oh bien sûr ça n'est pas un vent à décorner les cocus mais la fuite ne fait aucun doute : un beau petit souffle au cœur dans les règles de l'art. Je vous envoie chez un confrère cardiologue pour nous certifier ça. Je ne vais pas vous affoler ce matin mais je crois que vous en avez fini avec les années d'adolescence... »
Antoine lui fait « Je ne me souviens plus très bien du film de Louis Malle, mais au moins c'est romantique ? Peut-être un peu fin de siècle non ? » Le toubib acquiesce, « C'est sûr, on voit mal Stallone dans le rôle mais ne prenez pas ça à la légère. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter pour le moment, vous avez une quinzaine de bonnes raisons d'avoir un souffle au cœur, depuis le rhumatisme articulaire jusqu'à un fonctionnement défectueux des valves : ça ne ferme plus hermétiquement, une partie du sang reflue, le cœur travaille trop, il fatigue et ça fuit. Ropars nous dira quoi. Rassurez-vous, de nos jours ça se répare sans problème. De la tuyauterie, ni plus ni moins. Mais même la plomberie ça peut donner dans le sophistiqué. Lui, il est assez nouveaux matériaux... »


     

En marge de l’écriture

 

« L’opération a eu lieu en 2001, fin juin. Plus un mois de rééducation. C’était dans un village isolé de l’Oise. J’avais traîné mon ordinateur portable d’Amiens à Paris puis là, dont j’ai oublié le nom. Il fallait que je m’occupe. C’est alors que Philippe Crognier vint me voir. Depuis Saint-Quentin (Aisne) et à moto. Nous avions fait connaissance l’année d’avant, nous étions devenus amis et avions lancé avec quelques autres « Ecrivains en Picardie ». Il eut l’idée que j’attendais : Si nous écrivions un roman tous les deux ? Il eut l’idée du personnage en pensant à un de ses copains qui était contrôleur. Contrôleur de tout ce qui peut se contrôler, de tout ce qui doit être contrôlé, y compris les horaires SNCF… Il m’envoya dans la semaine le chapitre 1. Je lui répondis. On se revit au bout de quelque temps pour ajuster le scénario et réorganiser nos apports. De là naquit « Djebel », un beau roman, une belle histoire. Et Angel Reinhart parce que, je le savais, les éditeurs n’aiment pas les livres co-écrits. Nous l’envoyâmes au Castor Astral et la lectrice tomba immédiatement sous le charme : elle allait l’éditer. Philippe et moi bûmes le champagne. Mais le patron – dont j’ai oublié le nom, il y a une chance pour les mauvais souvenirs – fit la fine bouche et bref, cela ne se fit pas. J’ai plusieurs fois envoyé des textes au Castor Astral, en me recommandant de l’ami Lacoche qui y a ses entrées. Je n’ai jamais reçu la moindre réponse. Le patron du Castor Astral est un foutu con !... Mais j’aime beaucoup ses éditions… »